Préface des Éditions de Londres
Guerre et Paix est l’un des romans très réputés de l’écrivain russe Léon Tolstoï. Il l’écrivit entre 1865 et 1869 où il paraît en feuilleton dans Le messager russe.
Il parut en France en 1879, traduit par Irina Paskévitch, « Une Russe » comme l’indiquait l’édition.
L’édition que nous proposons est la traduction de J.-Wladimir Bienstock, plus complète, parue en 1904.
Guerre et Paix est un immense roman de plus de 2 000 pages dans lequel Tolstoï intercale l’histoire des guerres napoléoniennes en Russie – campagnes des troisième et quatrième coalitions de 1805 jusqu’à la paix de Tilsit et campagne de Russie en 1812 – avec une chronique de l’aristocratie russe de l’époque.
Toutes les dates indiquées dans le livre font référence au calendrier julien qui a été utilisé en Russie jusqu’au 31 janvier 1918. La Russie est alors passée au calendrier grégorien que l’Europe occidentale utilise depuis la fin du seizième siècle. Dans les années 1800, le calendrier julien avait 12 jours de retard sur le calendrier grégorien.
Le sujet
Guerre et Paix est une chronique de la vie des aristocrates en Russie au début du XIXe siècle où apparaissent, avec l’avènement du jeune roi Alexandre 1er, des idées nouvelles sur l’organisation de la société.
La société russe est alors confrontée aux guerres avec Napoléon. Tolstoï raconte ces guerres à travers la vie des hommes qui la font.
Tolstoï fait ressortir la bizarrerie de ces guerres.
Lors des guerres de 1805 à 1807, la grave défaite d’Austerlitz pour les Russes les affecte peu, elle est attribuée à la défection des Autrichiens. Elles se terminent par un accord franco-russe lors du traité de Tilsit pour un blocus du Royaume-Uni.
Lors de la campagne de Russie ou Guerre patriotique comme l’appellent les Russes, la puissante armée napoléonienne sera décimée malgré très peu de combats. L’armée russe recule régulièrement jusqu’à ce que Napoléon s’installe à Moscou que son armée s’occupe à piller. C’est le peuple russe qui entraînera la perte de l’armée napoléonienne en mettant le feu à Moscou ce qui la prive de son approvisionnement. Lorsque Napoléon décidera de quitter Moscou, le froid, la famine et la guérilla populaire détruiront presque totalement son armée.
Les personnages principaux
Le personnage récurrent du roman est le comte Pierre Bézoukhov. C’est le fils naturel du richissime comte Kirill Bézoukhov. Au début du roman, Pierre revient de l’étranger où il est allé étudier. Il est mal adapté à la vie de l’aristocratie russe. Il hérite de son père et devient très sollicité pour sa fortune. Il est peu apte à la décision et velléitaire. Il épousera la belle Hélène Kouraguine parce qu’il ne saura pas la refuser. Il adoptera les idées maçonniques pour les abandonner ensuite. Il voudra libérer ses serfs, mais se fera tromper par les intendants. C’est lorsqu’il sera prisonnier qu’il se sentira heureux parce qu’il n’aura plus rien à décider.
Le prince André Bolkonsky, ami de Pierre, est marié à Lise dont il attend un enfant. Il est désenchanté de la vie. Pour échapper à la vie de famille, il choisit d’aller faire la guerre. La défaite d’Austerlitz le dégoûte de l’armée. Il revient chez lui pour voir sa femme mourir en couche. Il est complètement désabusé de la vie. C’est la rencontre de la jeune Natacha Rostov dont il tombe amoureux qui lui rendra goût à la vie, mais cet amour se terminera mal, il repart à la guerre où il est tué.
La princesse Natacha Rostov, très jeune au début du roman. Elle est surtout intéressée par elle-même et est très sujette à ses pulsions. Elle sera profondément amoureuse du prince André, mais le trahira après l’avoir attendu pendant deux ans. Elle le retrouve blessé après la prise de Moscou et le veillera jusqu’à sa mort ce qui la transformera profondément. Elle finit par se marier avec Pierre pour vivre une vie de famille rangée.
Le comte Nicolas Rostov, jeune homme au début du roman qui décide de partir à la guerre. Il aime l’ordre et la discipline et se trouve parfaitement à l’aise dans l’armée. Très jeune, il a promis à sa cousine Sonia de l’épouser. Il rencontre la princesse Marie Bolkonsky et ils deviennent amoureux l’un de l’autre. Mais il refuse de l’épouser pour respecter sa parole envers Sonia. Ce n’est que lorsque Sonia, sous la pression de la comtesse Rostov, lui rendra sa parole qu’il pourra envisager d’épouser Marie.
Le général Koutouzov, général en chef des armées russes est un personnage réel apprécié par Tolstoï. Les autres personnages militaires sont inspirés d’hommes réels dont les noms ont été changés par l’auteur.
L’histoire vue par Tolstoï
Dans Guerre et Paix, Tolstoï exprime son avis sur l’histoire des guerres franco-russes du début du XIXe siècle.
À son avis, Napoléon n’est pas un grand stratège militaire, ce sont les circonstances et le hasard qui ont fait ses succès. S’il n’avait pas été facilement victorieux en Égypte et en Italie, il ne se serait pas retrouvé à la tête de l’état. S’il n’avait pas été avant tout un chef militaire, il n’aurait pas entraîné son pays dans la conquête de l’Europe.
De l’avis de Tolstoï, ce ne sont pas les grands stratèges militaires qui font les victoires, mais la volonté et l’action de chaque homme, quel que soit son rang.
Carte de Russie avec les principales batailles
Résumé du livre et extraits
Première partie
Anna Scherer reçoit chez elle à Pétersbourg. On y trouve Pierre qui revient de l’étranger, le prince Vassili Kouraguine avec sa fille, la belle Hélène, le prince André Bolkonskï et sa femme Lise.
Le prince André Bolkonskï et sa femme rentrent chez eux, accompagnés de Pierre qui est l’ami du prince. Le prince explique qu’il en a assez de sa femme, c’est pourquoi il veut partir à la guerre : « Mais si tu te lies à une femme, alors, comme un forçat enchaîné, tu perds toute liberté. Et tout ce qu’il y a en toi d’espérance et de forces se déprime, et le regret te déchire. Les salons, les potins, les bals, les ambitions, les nullités, voilà le cercle vicieux duquel je ne puis sortir. Je pars maintenant à la guerre, à la plus grande guerre qui fut jamais, et je ne sais rien. »
Pierre va ensuite boire chez Anatole Kouraguine, le fils du prince Vassili qui reçoit plusieurs camarades habitués des orgies. Ils vont faire la fête ailleurs, accompagnés par un ours. En chemin, ils sont arrêtés par un policier ; ils attachent le policier à l’ours et les jettent dans la Moïka. Cela leur vaut d’être interdits de résidence à Pétersbourg.
À Moscou, la comtesse Rostov reçoit la visite de ses amies pour célébrer sa fête et celle de sa fille cadette toutes deux prénommées Nathalie. Anna Mikhaïlovna qui est son amie d’enfance et son fils Boris sont présents.
Le comte Bezoukhov dont Pierre est le fils naturel est à la dernière extrémité. On s’inquiète de son héritage. Il aurait fait un testament faisant de Pierre son seul héritier. Le prince Vassili va rencontrer la princesse Katerina, pour tenter de subtiliser le testament.
Anna Mikhaïlovna amène Pierre chez son père avec la ferme intention de l’aider à défendre ses intérêts. Pierre assiste aux derniers moments du comte. Anna Mikhaïlovna parvient à prendre le testament.
Par le testament, Pierre est adopté et devient comte Bezoukkov et hérite de presque toute la fortune du comte.
Le regard que l’on porte sur Pierre a changé, dans la lettre qu’elle adresse à la princesse Marie, Julie écrit « Figurez-vous que les trois princesses n’ont reçu que très peu de chose, le prince Vassili n’a rien, et que c’est M. Pierre qui a tout hérité et qui, par-dessus le marché, a été reconnu pour fils légitime, par conséquent, comte Bezoukhov et possesseur de la plus belle fortune de la Russie. On prétend que le prince Vassili a joué un très vilain rôle dans toute cette histoire, et qu’il est reparti tout penaud pour Pétersbourg. »
Le prince André Bolkonskï arrive avec sa femme chez son père à la campagne. Il confie à son père et à la princesse Marie, sa sœur, le soin de sa femme enceinte pour partir à la guerre.
Deuxième partie
La deuxième partie raconte la campagne de la troisième coalition à partir de l’automne 1805. Les Russes sont alliés à l’Autriche et à la Suède. Sous la pression du Royaume-Uni, ils veulent limiter la mainmise de Napoléon sur l’Europe.
On retrouve l’armée russe en Autriche. Le commandant en chef Koutouzov fait la revue du régiment qui est en attente.
Le prince André Bolkonskï est aide de camp de Koutouzov.
La nouvelle arrive de la défaite du général autrichien Mack qui, enfermé dans Ulm par les troupes de Napoléon, capitule le 20 octobre 1805.
Le 23 octobre, les troupes russes de Koutouzov se replient sur Vienne.
Les trente-cinq mille hommes de l’armée de Koutouzov, abandonnés par les Autrichiens, reculent devant les six cent mille hommes commandés par Bonaparte. Le 30 octobre, l’armée russe attaque et écrase la division de Mortier sur la rive gauche du Danube. Cela redonne du courage aux troupes.
Le prince André Bolkonskï est chargé d’aller annoncer la nouvelle à l’empereur d’Autriche qui se trouve à Brünn. Il est très déçu de la réception et du peu d’intérêt que cette victoire semble susciter. Il apprend que Vienne est occupée et que probablement les Autrichiens vont vouloir signer la paix avec Bonaparte. C’est ce qui arrivera le 26 décembre avec le Traité de Presbourg.
Pendant que Bolkonskï est à Brünn, les Français sont parvenus à traverser le Danube. La situation de l’armée de Koutouzov est mauvaise. Bolkonskï rejoint l’armée russe qui se replie en grand désordre.
Début novembre, Koutouzov veut rejoindre le reste de l’armée russe à Znaïm avant que les Français ne lui coupent la route. Pour cela, il envoie un détachement de quatre mille hommes pour retarder l’avance des Français bien qu’il sache que peu d’entre eux reviendront. Le prince André accompagne ce détachement.
Les Français attaquent le détachement. La bataille est rude, mais les Russes tiennent malgré beaucoup de pertes. Le lendemain, les restes du détachement peuvent rejoindre l’armée de Koutouzov et tous rejoignent les autres troupes coalisées.
Troisième partie
Dans la troisième partie, on revient à Moscou. Pierre est comte Bezoukhov. Le prince Vassili ne le quitte pas. Il lui procure un poste d’attaché au corps diplomatique et l’emmène à Pétersbourg. Pierre n’a plus un instant à lui. Tous veulent le voir et le solliciter. Le prince Vassili veut lui faire épouser sa fille, la belle Hélène. Il est invité chez Anna Pavlovna où il doit la rencontrer. Il accepte cette invitation sans trop analyser ses sentiments : « Pierre sentit pour la première fois qu’entre lui et Hélène se formait un lien reconnu par les autres personnes, et cette idée, en même temps qu’elle l’effrayait et semblait lui imposer un devoir qu’il ne pouvait remplir, lui plaisait comme une supposition amusante. »
Pierre traîne à demander la main d’Hélène. Il le voudrait bien, mais il ne peut s’y résoudre. Il faut que le prince Vassili lui force la main. Pierre arrive alors à dire à Hélène : « Je vous aime ». Un mois et demi après, ils sont mariés.
Ensuite, le prince Vassili veut marier son fils Anatole avec la princesse Marie, fille du prince Andréiévitch et sœur du prince André. Il vient rendre visite au prince Andréiévitch avec son fils dans l’intention de demander la princesse Marie en mariage. Le prince Andréiévitch n’apprécie pas beaucoup le prince Vassili et la princesse Marie est épouvantée à l’idée du mariage.
L’entretien commence mal. Le prince Andréiévitch n’apprécie pas la coiffure que la princesse Lise a faite à Marie et il le dit crûment : « elle n’a pas besoin de se défigurer, elle est assez laide sans cela. Et il se rassit à sa place sans faire attention à sa fille prête à pleurer. »
Anatole est plus intéressé par la belle Mlle Bourienne, la dame de compagnie, et Marie les voit enlacés dans le jardin d’hiver. Marie refuse de se marier, non pas à cause du comportement d’Anatole, mais parce qu’elle veut tout faire pour que Mlle Bourienne puisse épouser Anatole.
Les Rostov reçoivent une lettre de leur fils Nicolas leur apprenant qu’il a été légèrement blessé et qu’il a été promu officier.
Pendant ce temps, les armées russe et autrichienne se sont regroupées près d’Olmütz, rassemblant 80 000 hommes. Le 13 novembre, une grande revue des empereurs d’Autriche et de Russie a lieu.
Le 15 novembre, le Conseil supérieur de la guerre, avec la participation des empereurs, décide de livrer immédiatement la bataille à Bonaparte, contrairement à l’avis de Koutouzov qui souhaitait que tous les renforts soient arrivés.
Le 16 novembre, l’armée avance à l’attaque. Elle remporte une victoire, la prise de Vischau, en faisant prisonnier un escadron français.
Le 17 novembre, Napoléon envoie Savary pour proposer au tsar Alexandre une entrevue. Le tsar refuse et envoie le prince Dolgoroukov parlementer avec les Français.
Les 18 et 19 novembre, les troupes alliées avancent un peu sans rencontrer d’opposition.
Le 19 au soir, Veyroter, général autrichien responsable des combats, présente le plan d’attaque qu’il a préparé, sûr de lui et ne tenant compte d’aucune des observations qui lui sont faites.
Le prince André est inquiet. Il médite sur son engagement dans l’armée et comprend qu’il aime la gloire : « Je ne l’avouerai jamais à personne, mais, mon Dieu, que donc faire si je n’aime que la gloire, l’amour des hommes. La mort, les blessures, la perte de la famille, rien ne m’effraye. Si chers que puissent m’être mon père, ma sœur, ma femme, et ceux que j’aime le plus, si terrible et antinaturel que ce puisse paraître, je les donnerais tous sans hésiter, pour un moment de gloire, de triomphe, pour l’amour d’hommes que je ne connais pas, que je ne connaîtrai jamais, pour l’amour de ces hommes-là. »
Le 20 novembre (le 2 décembre dans le calendrier grégorien), à cinq heures du matin, les troupes alliées se mettent en marche dans le brouillard pour attaquer le flanc droit de l’armée française. Mais les troupes françaises ne sont pas là où on les cherche et pendant que l’armée alliée descend la colline de Pratzen, Napoléon occupe le haut de la colline, position stratégique.
À cinq heures du soir, la bataille d’Austerlitz est perdue pour les troupes russes et autrichiennes.
Le prince André a été blessé et fait prisonnier. Il ne répond pas à Napoléon qui s’adresse à lui en faisant la visite des prisonniers : « Tout semblait si inutile et si mesquin en comparaison de ces sévères et majestueux élans de la pensée qu’excitait en lui l’affaiblissement de ses forces, dû à la perte du sang, aux souffrances et à l’attente d’une mort prochaine ! En regardant Napoléon dans les yeux, le prince André pensait au néant de la grandeur, au néant de la vie dont personne ne pouvait comprendre le sens, au néant encore plus grand de la mort dont nul vivant ne pouvait ni percevoir ni expliquer le sens. »
Quatrième partie
Début 1806, Nicolas Rostov rentre chez lui en permission amenant son ami Denissov avec lui.
À Moscou, on excuse la défaite d’Austerlitz : « On trouvait des causes à cet événement incroyable, inouï, impossible : à la défaite des Russes. Tout est devenu clair, et dans tous les coins de Moscou, on répétait la même chose. Ces causes étaient : la trahison des Autrichiens, l’approvisionnement défectueux de l’armée, la trahison du polonais Prjebichevsky et du Français Langeron, l’incapacité de Koutouzov et (on le disait en sourdine) la jeunesse et l’inexpérience de l’empereur qui se fiait à des gens mauvais et nuls. »
On retrouve Pierre qui se bat en duel avec son ancien ami Dolokhov, car on dit que celui-ci a séduit sa femme, la belle Hélène. Pierre, qui n’a jamais tenu un pistolet, réussi à blesser Dolokhov sans être lui-même touché.
Pierre a des remords d’avoir blessé Dolokhov. Il se repent de s’être marié alors qu’il n’aimait pas Hélène. Hélène vient le trouver pour lui reprocher son duel. Il se met dans une grande colère et décide de se séparer. Il part pour Pétersbourg.
Le vieux prince Bolkonskï et sa fille Marie apprennent qu’André est porté disparu. La princesse Marie décide d’attendre que Lise ait accouché avant de le lui apprendre.
Le prince André n’est pas mort, il revient juste le jour où sa femme accouche. L’accouchement se passe mal et la princesse Lise meurt en accouchant d’un garçon en bonne santé.
Nicolas Rostov reste à Moscou où il est aide de camp du gouverneur. Il s’est lié d’une grande amitié avec Dolokhov qu’il reçoit souvent chez lui. Celui-ci tombe amoureux de Sonia qui, elle, aime toujours Rostov.
À l’automne 1806, on reparle d’une nouvelle guerre contre Napoléon. Rostov veut retourner dans son régiment.
Avant qu’il ne parte, Dolokhov demande la main de Sonia qui refuse. Pour se venger, Dolokhov provoque Nicolas au jeu et lui fait perdre une fortune que son père est obligé de payer.
Cinquième partie
Pierre est en route pour Pétersbourg. Suite à son combat contre Dolokhov, il tourne et retourne dans sa tête des idées morbides. Dans un relais, il est abordé par le franc-maçon Bazdéiev et est ébranlé par son discours lui recommandant de cesser la vie de débauche pour faire le bien autour de lui.
Pierre accepte de devenir franc-maçon et de changer complètement de mode de vie en respectant les règles : « 1o la modestie, la conservation du secret de l’ordre ; 2o l’obéissance aux supérieurs de l’ordre ; 3o les bonnes mœurs ; 4o l’amour de l’humanité ; 5o le courage ; 6o la générosité ; 7o l’amour de la mort. »
Il est intronisé franc-maçon et se sent complètement changé intérieurement. Il décide alors d’aller vivre sur ses terres pour y faire le bien.
En 1806, la Russie se prépare à être attaquée par Napoléon qui avance en Europe. Le vieux prince Bolkonski a été nommé l’un des huit généraux des milices organisées en Russie. Le prince André n’a pas souhaité retourner se battre.
Pierre arrive sur ses terres et réunit les intendants pour leur demander d’émanciper les paysans et d’alléger les corvées. Il est trompé par les intendants qui lui font croire que ses bienfaits rendent leurs paysans heureux alors que rien ne leur est accordé.
Pierre rend ensuite visite au prince André avec qui il échange longuement sur son désir de faire du bien aux paysans.
Pierre essaye de convertir André à la doctrine maçonnique. Le prince André n’est pas convaincu : « Oui, c’est la doctrine d’Herder, dit le prince André. Ce n’est pas elle qui me convaincra. La vie et la mort, voilà ce qui me convainc. Ce fait de voir qu’une créature chère, liée à toi, envers qui tu étais coupable et espérais te justifier (la voix du prince André tremblait et il se détourna), de voir tout à coup cette créature souffrir, se plaindre et cesser d’exister… Pourquoi ? Il n’est pas possible qu’il n’y ait pas de réponse ! Je crois qu’il y a une réponse… Et voilà ce qui me convainc, voilà ce qui m’a convaincu, dit le prince André. »
Nicolas Rostov rejoint son régiment. Il est heureux de retrouver la tranquillité d’esprit qu’impose la discipline militaire. Il veut réparer sa faute en remboursant sur cinq ans l’argent qu’il a réclamé à son père. Le régiment est cantonné dans une ville allemande où il n’y a plus rien à manger et plus d’approvisionnement.
Denissov qui est le commandant du régiment détourne un convoi pour nourrir ses hommes. Pour cela, il est convoqué au conseil de guerre. Mais il est blessé et se retrouve à l’hôpital.
Rostov rend visite à Denissov à l’hôpital. Il trouve l’hôpital dans un état déplorable où le typhus emporte les hommes sains. Denissov est très déprimé, il n’est pas encore guéri et il est poursuivi pour avoir détourné le convoi, on lui recommande de demander sa grâce à l’empereur, mais lui veut se défendre. Finalement, quand Rostov est sur le point de partir, Denissov lui remet la demande de grâce pour qu’il la transmette.
Rostov se rend à Tilsit où l’empereur Alexandre va rencontrer Napoléon pour signer la paix et l’alliance de la Russie et de la France le 7 juillet 1807. Cette paix fait suite à la victoire de Napoléon à Friedland le 14 juin 1807. Elle marque la fin de la quatrième coalition. Rostov rend visite à Boris Droubetzkoï qui a accès à l’empereur. Rostov est surpris de voir que Boris reçoit des officiers français comme des amis. Boris l’éconduit lui disant que c’est inopportun de remettre cette demande à l’empereur.
Rostov veut remettre directement la demande à l’empereur et va à son logement. Il rencontre son général de division qui fait partie de la suite de l’empereur qui est prêt à remettre la demande à l’empereur.
Rostov peut alors apercevoir Napoléon et l’empereur Alexandre en grande amitié.
Sixième partie
Depuis deux ans, le prince André vit à la campagne partageant sa vie entre la lecture et les réformes de ses domaines. Il doit se rendre chez le vieux prince Rostov pour faire signer des papiers. La gaieté de Natacha lui redonne le goût de la vie mondaine et il décide de retourner à Pétersbourg où il arrive à l’été 1809.
Il veut présenter à l’empereur un mémoire sur la refonte du Code militaire. C’est le comte Araktchéiev, chargé des affaires militaires de l’empire qui est chargé de lui donner une réponse. Le comte n’a pas apprécié le mémoire, mais nomme le prince André membre du comité du code militaire.
Le prince André fait la connaissance de Spéransky chargé par l’empereur Alexandre de mettre en place les réformes de l’État. Il est en admiration devant Spéransky. Grâce à l’appui de Spéransky, le prince André est nommé chef de la section de la commission de codification des lois.
En 1808, sans le vouloir, Pierre s’est trouvé à la tête de la maçonnerie de Pétersbourg. Il est très déçu de voir comment se comportent les membres. Aussi, il part à l’étranger pour étudier les mystères de l’ordre et rencontrer les chefs supérieurs. À son retour, il fait une grande déclaration aux membres prônant des efforts de vertu. Son discours est mal reçu, on le prend pour un illuminé. Alors, il quitte la loge.
Pierre est découragé par cet échec. C’est à ce moment que sa femme cherche à revenir auprès de lui. Il ne se sent pas la force de refuser.
Chez les Rostov, les affaires vont mal. Le vieux comte doit reprendre du service et pour cela, il s’installe à Moscou. Berg profite des difficultés des Rostov pour demander leur fille aînée, Vera, en mariage et obtenir le consentement bien que les parents s’en sentent un peu honteux.
Boris n’avait pas revu Natacha depuis plusieurs années. Il vient rendre visite aux Rostov et est surpris par la beauté nouvelle de Natacha. Mais Natacha ne veut plus que jouer avec lui. Boris abandonne le salon des Rostov.
Les Rostov sont invités à un grand bal auquel participe l’empereur. Natacha est invitée à danser dès la deuxième danse par le prince André Bolkonskï et tous les deux en sont ravis. Le prince André est si content qu’il pense qu’il pourrait se remarier avec elle.
Dès le lendemain, il rend visite aux Rostov où il reste volontiers pour dîner.
Berg et Vera donnent une soirée où se retrouvent les Rostov, le prince André et Pierre. Pierre est surpris de voir les regards particuliers que se lancent Natacha et le prince André.
Le prince André rend visite à Pierre à qui il confie son amour pour Natacha et affirme qu’il veut absolument se marier avec elle.
Le prince André part chez son père pour lui demander son consentement pour épouser Natacha. Son père qui est contre ce mariage accepte à condition qu’ils attendent une année pendant laquelle le prince André devrait aller à l’étranger pour se soigner. Le prince André revient chez les Rostov et demande la main de Natacha à la comtesse qui accepte. Natacha est ravie, regrettant seulement de devoir attendre une année.
Septième partie
Nicolas Rostov se plaît dans la vie nonchalante de l’armée en temps de paix. Mais, à la demande de sa mère, il doit rentrer chez ses parents pour aider son père à remettre ses affaires en ordre.
Rentré à Otradnoié, Nicolas tente de s’occuper des affaires de la maison, mais il n’y comprend rien et s’en désintéresse rapidement. Il préfère s’occuper en allant à la chasse au loup.
Les affaires des Rostov ne s’arrangent toujours pas, la comtesse voudrait que Nicolas fasse un riche mariage avec Julie Karaguine. Mais Nicolas aime toujours Sonia et veut respecter ses engagements sans se soucier de la fortune de la famille.
Le retour du prince André est retardé, car sa blessure s’est rouverte. Natacha s’ennuie et l’attend impatiemment.
À Noël, on se déguise chez les Rostov. Sonia est déguisée en homme et est très enjouée. Elle séduit complètement Nicolas qui se demande pourquoi il a attendu si longtemps pour lui demander de l’épouser.
Nicolas dit à sa mère qu’il est maintenant décidé à se marier avec Sonia. Sa mère reçoit très mal sa décision souhaitant un meilleur mariage. Finalement, Nicolas repart à l’armée avec l’intention de démissionner pour se marier avec Sonia à son retour.
Huitième partie
Pierre, après l’annonce des fiançailles du prince André, se lasse de la vie rigoureuse exigée par les maçons. Il reprend ses anciennes habitudes de fréquentation des clubs et des amis célibataires en buvant beaucoup. Hélène lui en fait le reproche, il décide alors de retourner à Moscou.
À Moscou, il sort beaucoup pour se distraire, est généreux avec tous ceux qui lui demandent quelque chose. Il ne pense plus à réformer la société, mais se laisse aller en acceptant l’affection de ses semblables.
Le vieux prince Bolkonskï revient à Moscou avec Marie au commencement de l’hiver 1810. Marie est très malheureuse à Moscou sans amies et sans sorties et continuellement tyrannisée par son père qui vieillit mal.
Boris est venu à Moscou pour faire la cour à la riche héritière Julie Karaguine. Ils décident de se marier.
Fin janvier, le comte Ilia Andréiévitch arriva à Moscou avec Sonia et Natacha. Il s’installe chez Maria Dmitrievna Akhrosimovna. On achète le trousseau pour Natacha et Natacha doit rendre visite à Marie Bolkonskï qui veut faire sa connaissance.
Natacha, accompagnée de son père, rend visite au prince Bolkonskï et à Marie. Seule Marie les reçoit, le prince prétextant une indisposition. L’entrevue entre Natacha et Marie se passe très mal. Marie en veut à Natacha d’avoir été choisie par son frère.
Le soir, Natacha va à l’opéra où elle fait la connaissance d’Hélène Bezoukhov et de son frère Anatole qui lui fait la cour, ce qui ne lui déplaît pas. Le soir, elle éprouve du remords d’avoir écouté Anatole Kouraguine avec plaisir. De son côté, Kouraguine a trouvé Natacha très belle et est bien décidé à continuer à la courtiser.
Dès le dimanche suivant, Hélène vient voir Natacha pour l’inviter chez elle à la demande de son frère qui en est amoureux. Natacha ne sait pas refuser.
Chez Hélène, Anatole réussit à se trouver seul avec Natacha et en profite pour l’embrasser. Natacha ne sait plus quoi penser : « Elle aimait le prince André, elle se rappelait vivement combien elle l’aimait ; mais elle aimait aussi Anatole, c’était indiscutable. « Autrement cela aurait-il pu être ? » pensait-elle. « Après ce qui s’est passé, si j’ai pu, en lui disant adieu, répondre à son sourire par un sourire, si j’ai pu faire cela, c’est la preuve que je l’ai aimé depuis le premier instant. Alors il est bon, noble, beau, et on ne peut point ne pas l’aimer. Que dois-je faire si je l’aime et si j’en aime un autre ? » se disait-elle sans pouvoir répondre à ces terribles questions. »
Natacha est folle d’amour pour Anatole. Elle écrit à la princesse Marie qu’elle n’a plus l’intention de se marier avec André. Sonia voit remettre une lettre en secret à Natacha et elle est persuadée que Natacha a l’intention de s’enfuir avec Anatole.
Maria Dmitrievna, voyant Sonia en pleurs lui a fait avouer que Natacha allait s’enfuir. Elle enferme Natacha et l’enlèvement échoue.
Maria Dmitrievna demande à Pierre de convaincre Anatole de quitter Moscou. Pierre révèle à Natacha qu’Anatole est déjà marié. Pierre oblige Anatole à quitter Moscou pour Pétersbourg.
Le prince André est de retour à Moscou où il est mis au courant de ce qui s’est passé entre Anatole et Natacha. Il ne veut pas la revoir et donne les lettres de Natacha à Pierre pour qu’il les lui rende.
Pierre rencontre Natacha et il est si ému quand elle lui dit que la vie est finie pour elle qu’il lui fait presque une déclaration d’amour : « Si je n’étais pas moi, mais l’homme le plus beau, le plus spirituel, le meilleur au monde, et si j’étais libre, tout de suite à genoux, je demanderais votre main et votre amour. »
Neuvième partie
Fin 1811 se prépare la guerre entre les forces de Napoléon et la Russie. Les causes connues de cette guerre épouvantable paraissent dérisoires : « Les historiens disent avec une assurance naïve que les causes de cet événement étaient : l’offense faite au duc d’Oldenbourg, l’inobservance du blocus continental, l’ambition de Napoléon, la fermeté d’Alexandre, les fautes des diplomates, etc. »
Les causes profondes sont liées à l’Histoire et sont difficiles à analyser : « Pour nous qui ne sommes ni contemporains de ces faits, ni des historiens, pour nous, qui ne sommes pas entraînés par les recherches et qui, par suite, contemplons les événements avec le simple bon sens non obscurci, les causes de ces événements nous apparaissent incalculables. À mesure que nous nous enfonçons dans les recherches des causes et que nous discernons chaque cause isolément ou la série des causes, elles se présentent à nous également justes en soi, et également fausses, par leur insignifiance en comparaison de l’énormité de l’événement, et leur insuffisance (sans la participation de toutes les autres causes concordantes) pour produire ce qui est arrivé. »
Le 29 mai 1812, Napoléon quitte Dresde pour rejoindre l’armée et le 12 juin commence l’invasion des territoires russes en franchissant le Niémen.
L’empereur Alexandre est à Vilna où il passe l’armée en revue. Rien n’est prêt pour les combats. Le soir du 13 juin, un grand bal est donné et c’est là que l’empereur apprend que les troupes de Napoléon ont traversé le Niémen.
L’empereur Alexandre envoie Balachov porter un courrier à Napoléon. Il est mal reçu par les Français, en particulier par Davoust. Ce n’est qu’à Vilna quand les troupes françaises y sont arrivées que Napoléon reçoit Balachov. Napoléon ne veut pas parlementer, il explique à Balachov les raisons pour lesquelles il va faire la guerre. Balachov repart avec une lettre confirmant ces propos et la guerre est irrémédiable.
Le prince André va à Pétersbourg pour provoquer Anatole en duel. Mais Anatole a rejoint l’armée en Moldavie. Le prince André, malheureux de sa rupture avec Natacha, reprend du service dans l’armée.
Le prince André arrive à la fin de juin 1812 au quartier général des armées russes. Anatole n’y est pas, mais est retourné à Pétersbourg.
Au quartier général, les différentes factions se querellent sur la façon de mener la guerre. Il y a ceux qui veulent attaquer tout de suite les Français et ceux qui veulent se replier dans le territoire Russe pour trouver une occasion favorable. La présence de l’empereur crée un climat délétère de lutte entre les courtisans pour obtenir des avantages.
La stratégie, conçue par Pfull, qui avait été prévue pour arrêter les Français était d’établir un camp fortifié à Drissa. Mais l’empereur est maintenant convaincu que c’est une erreur qui entraînerait la perte de l’armée russe.
Nicolas Rostov a repris son service à la tête de son régiment de hussards. Il a écrit à Sonia qu’il ne pourra la rejoindre qu’à la fin de la guerre. Il est d’abord envoyé en Pologne puis recule sur Vilna, puis vers Sventziany, puis jusqu’à Drissa puis jusqu’à la frontière russe.
Le 13 juillet 1812, Rostov participe à un accrochage contre l’armée française près du bourg d’Ostrovna. Les hussards réussissent à repousser les dragons français et ramènent des prisonniers.
Les Rostov se sont réinstallés à Moscou pour soigner Natacha qui est très malade. Les médecins se contredisent, mais lui donnent des pilules pour faire quelque chose : « Les docteurs étaient utiles à Natacha en ce qu’ils embrassaient et frottaient le bobo en lui affirmant que bientôt il n’y paraîtrait plus si le cocher allait à la pharmacie de l’Arbate et apportait pour un rouble soixante-dix kopeks de cachets et de pilules dans une jolie petite boîte et si la malade prenait ces cachets dans de l’eau bouillie, toutes les deux heures, régulièrement. »
Natacha se remet, mais reste triste et sans activités. C’est en passant une semaine à faire ses dévotions du matin au soir qu’elle reprend un peu goût à la vie.
Au commencement de juillet 1812, des bruits de plus en plus alarmistes se répandent à Moscou sur la marche de la guerre. On dit que les Russes ont déjà reculé jusqu’à Smolensk. On lit dans les églises des prières pour l’armée.
Pierre se rend chez les Rostov. Il est de plus en plus ému en face de Natacha qui recherche son amitié. Il préfère partir et décide en lui-même de ne plus revenir.
Pétia veut s’engager dans l’armée. Il assiste, très ému, à l’arrivée de l’empereur au Kremlin.
Le 15 juillet, l’empereur réunit la noblesse de Moscou et les marchands pour obtenir des hommes et de l’argent pour la guerre. La noblesse promet de fournir dix hommes équipés pour mille de leurs serviteurs.
Dixième partie
La guerre de 1812 a été catastrophique pour l’armée française. La victoire russe est due au hasard, personne n’aurait pu prévoir ce qui s’est passé : « Ce qui fit en 1812 la perte de l’armée française est clair pour nous. Personne ne niera que la cause de la perte des troupes françaises de Napoléon ne fût, d’un côté, leur entrée trop tardive, sans préparation pour la campagne d’hiver, dans les profondeurs de la Russie, et, d’autre part, le caractère que prit la guerre par suite de l’incendie des villes russes et de la haine contre l’ennemi excitée dans le peuple russe. Mais alors, non-seulement personne ne prévoyait (ce qui semble maintenant évident) que ce moyen pouvait seulement causer la perte des huit cent mille hommes de la meilleure armée du monde, dirigée par le meilleur des capitaines, en contact avec l’armée russe deux fois plus faible, inexpérimentée, dirigée par des chefs sans expérience, non seulement personne ne le prévoyait, mais tous les efforts, du côté des Russes, étaient toujours dirigés pour empêcher ce qui seul pouvait sauver la Russie, et, du côté des Français, malgré l’expérience et ce qu’on appelle le génie militaire de Napoléon, tous ses efforts tendaient à se trouver en face de Moscou à la fin de l’été, c’est-à-dire à faire précisément ce qui devait le perdre. »
L’armée russe est coupée en deux, une partie sous le commandement de Barclay, un Allemand, et l’autre sous le commandement de Bagration. Il faudrait regrouper l’armée pour livrer bataille aux Français, mais Bagration n’est pas pressé de le faire, car il passerait sous le commandement de Barclay qui est impopulaire. Bien que l’empereur ait quitté l’armée, Barclay ne se sent pas libre pour livrer bataille sous les yeux du grand-duc et de Benigsen. Il en résulte que l’armée russe recule toujours.
Enfin, les deux armées russes se rejoignent à Smolensk et la bataille a lieu. Smolensk se rend aux Français, mais les habitants en colère quittent la ville en y mettant le feu.
Lissia-Gorï, la propriété du prince Nicolas Andréiévitch Bolkonskï, se trouve à soixante verstes au-delà de Smolensk et à trois verstes de la route de Moscou. Le prince André recommande à son père de rejoindre Moscou.
Le 10 août, le prince André est, avec son régiment, sur la route de Lissia-Gorï après que Smolensk ait été abandonnée. On lui dit que sa famille est partie se réfugier à Moscou. Il se rend à la propriété et constate que tous sont partis et que beaucoup de choses sont détruites suite au campement des troupes la veille.
Pour remédier au désaccord de commandement entre Barclay et Bagration, le 8 août, le vieux général Koutouzov est nommé général en chef de toutes les armées.
Le prince Nicolas Andréiévitch et la princesse Marie ne sont pas allés jusqu’à Moscou. Ils se sont arrêtés dans leur propriété de Bogoutcharovo. Là, le vieux prince a eu une attaque et est mort quelques jours après.
Après les funérailles, la princesse Marie doit partir d’urgence à Moscou, mais les paysans de Bogoutcharovo ont décidé de rester sur place, les Français ayant fait savoir qu’ils paieraient toutes les marchandises. Ils refusent de fournir des chevaux pour le déménagement de la princesse.
La princesse Marie est anéantie. Mlle Bourienne vient lui expliquer qu’il ne faut pas qu’elle parte, car les Français la traiteront convenablement. À cette idée d’être commandée par les Français, la princesse se ressaisit et veut absolument partir.
On lui dit que les paysans n’ont rien à manger, alors elle décide de distribuer le blé de la réserve seigneuriale. Mais les paysans refusent le blé pensant qu’on veut les contraindre à partir.
Le lendemain, le 17 août, quand la princesse Marie veut partir, les paysans l’en empêchent. Nicolas Rostov, qui passait à cet endroit en cherchant du fourrage, vient l’aider.
Nicolas Rostov se précipite auprès de la princesse Marie et dès qu’il a compris la situation, bien qu’il ne soit qu’avec trois soldats, il va affronter les paysans. Il fait ligoter les deux meneurs et aussitôt tous les paysans se calment et aident Marie à partir. La princesse Marie a été émue de sa rencontre avec Nicolas et se sent amoureuse. De son côté, Nicolas se dit que ce serait une bonne chose qu’il se marie avec la princesse. Mais il y a Sonia !
Koutouzov a pris ses fonctions et il fait venir le prince André auprès de lui à Tsarevo-Zaïmistché où se trouve alors l’armée russe. Koutouzov lui propose de lui servir d’aide de camp, mais le prince André préfère commander son régiment.
Le prince repart, réconforté, faisant confiance à Koutouzov qui accepte de laisser venir les événements : « Il n’y aura rien de lui, il n’inventera rien, n’entreprendra rien, pensait le prince André, il écoutera tout, se rappellera tout, il mettra tout à sa place. Il n’empêchera rien d’utile et ne permettra rien de nuisible. Il comprend qu’il y a quelque chose de plus fort et de plus important que sa volonté : la marche inévitable des événements, et il sait les voir, il sait comprendre leur importance et, en vue de cette importance, il sait réussir à y faire participer sa volonté que dirige un autre. Et ce qui fait surtout qu’on le croit, c’est qu’il est Russe »
À Moscou, on s’attend à l’arrivée des Français et de plus en plus de personnes partent pour Pétersbourg.
Pierre, lui, reste à Moscou ne sachant que décider. En se promenant dans Moscou, il voit que l’on fustige des Français installés à Moscou devant la foule vindicative. Il décide alors qu’il doit rejoindre l’armée. Le 24 août, il rejoint Mojaïsk.
À ce moment, les combats font rage. Le 24 août, les Français prennent la redoute de Schévardine et le 26 a lieu la bataille de Borodino (bataille de la Moskova), la plus meurtrière de la guerre. La victoire coûte beaucoup d’hommes aux Français, mais leur permet d’entrer dans Moscou la semaine suivante.
Le 25, Pierre retrouve Boris qui est aide de camp du général Bénigsen. Boris lui propose de rester avec eux au milieu des troupes.
Le soir, il rend visite au prince André qui le reçoit froidement ayant d’autres préoccupations. André sait que la bataille du lendemain va être très meurtrière et il s’attend à mourir. Il exprime à Pierre ses pensées sur la guerre : « La guerre n’est pas une chose gracieuse, mais l’affaire la plus vilaine, et il faut le comprendre et n’en pas faire un jeu. Il faut accepter sérieusement et sévèrement cette terrible nécessité. Tout est en cela. Rejetez le mensonge et la guerre sera la guerre et non un jeu ; autrement, la guerre est l’amusement favori des gens oisifs et légers. La classe militaire est la plus honorée, et qu’est-ce que la guerre ? Que faut-il pour le succès dans l’œuvre militaire ? Quelles sont les mœurs de la société militaire ? La guerre, la bataille, c’est le meurtre ; les instruments de la guerre : l’espionnage, la trahison et leur encouragement, la ruine des habitants, le pillage et le vol pour nourrir les armées, la tromperie et le mensonge qu’on appelle la ruse militaire. »
Le 25 août, Napoléon prépare les consignes pour la bataille du lendemain. Mais, le lendemain, en fonction des réactions des Russes, les consignes ne peuvent pas être suivies et Napoléon est trop loin pour donner de nouveaux ordres. Cela montre encore que les événements historiques ne sont pas liés à la décision des hommes : « il se présente une autre réponse : que la marche des événements est prédestinée, qu’elle dépend de la concordance de tous les actes des hommes qui participent à ces événements et que l’influence des Napoléon sur la marche de ces événements n’est qu’extérieure et fictive. »
Pierre est resté pour voir la bataille. Il se promène au milieu des troupes, sans aucune peur, sans bien comprendre ce qui se passe et se faisant régulièrement rabrouer parce qu’il gêne les hommes.
Napoléon est inquiet de l’indécision de la bataille : « Napoléon, après sa longue expérience de la guerre, savait bien ce que signifiait la bataille non gagnée, après huit heures d’efforts, par celui qui attaque. Il savait que c’était presque un combat perdu et qu’au point où se trouvait la bataille, le moindre hasard pouvait le perdre lui-même et ses troupes. »
De son côté, Koutouzov considère que les Russes sont victorieux et le soir, il donne l’ordre d’attaquer le lendemain.
Le régiment du prince André est en attente sous les boulets des canons. Le prince André est blessé par une grenade et est évacué vers les ambulances. Il y retrouve Anatole, le séducteur de Natacha, qui est gravement blessé lui aussi. Il oublie alors sa haine.
La bataille a été terrible, la moitié des hommes sont morts ou blessés. L’armée russe est désorganisée et épuisée et ne peut continuer à attaquer les Français. Koutouzov est obligé de continuer à reculer jusqu’à Moscou. La route de Moscou est ouverte à Napoléon, mais son armée est découragée. La défaite est en chemin.
Onzième partie
Cette partie s’ouvre par une réflexion sur l’histoire : « Pour étudier les lois de l’histoire, nous devons changer tout à fait l’objet de l’observation, laisser tranquilles les rois, les ministres, les généraux, et étudier les éléments communs, infiniment petits, qui guident les masses. Personne ne peut dire jusqu’à quel point l’histoire pourra atteindre par cette voie la compréhension des lois de l’histoire, mais il est évident que sur cette voie seule se trouve la possibilité de saisir ces lois, et que sur cette voie la raison humaine n’a pas fait la millième partie des efforts qui ont été déployés par les historiens pour décrire les actes de divers rois, capitaines et ministres, et pour exposer leurs considérations à propos de ces actes. »
Koutouzov recule jusqu’à Moscou où il voudrait se battre, mais la position devant Moscou est considérée par tous comme impossible pour un combat. Koutouzov doit se résoudre à continuer de reculer en abandonnant Moscou. Les habitants riches de Moscou refusant de vivre dans Moscou occupée désertent la ville.
Hélène Bezoukhov en revenant à Pétersbourg voudrait se remarier. Pour cela, elle décide de se convertir à la religion catholique afin d’obtenir une dispense du Saint-Siège. Elle écrit à Pierre qui est toujours à Moscou son intention de se marier. Elle hésite d’ailleurs entre deux prétendants.
Pierre quitte Borodino très éprouvé par ce qu’il a vu. La nuit, il a une révélation : « Réunir tout ! se dit Pierre. Non, pas unir, on ne peut réunir des idées, mais on peut mettre d’accord toutes ses idées, voilà ce qu’il faut ! Oui, il faut mettre d’accord. Il faut mettre d’accord ! »
Quand Pierre rentre à Moscou, le gouverneur Rostoptchine le convoque d’urgence. Il lui reproche d’être maçon et lui recommande de quitter Moscou au plus vite.
En rentrant chez lui, Pierre trouve la lettre d’Hélène lui disant qu’elle va se remarier. Le lendemain matin, il disparaît par la porte de service et personne ne sait où il est.
Le 31 août, les Rostov sont en pleins préparatifs pour le départ en emportant tout ce qu’ils peuvent. Natacha ouvre les portes de la maison pour qu’on y abrite des blessés et parmi eux se trouve le prince André qui est au plus mal.
Le 1er septembre, trente chariots sont prêts à partir. Mais, les blessés supplient qu’on les emmène et le comte fait décharger les chariots pour pouvoir emporter les blessés. Les Rostov partent enfin en laissant la plupart des bagages.
En chemin, ils aperçoivent Pierre habillé avec un cafetan de cocher. Il annonce à Natacha qu’il reste à Moscou.
Koutouzov donne l’ordre aux troupes de reculer au-delà de Moscou, sur la route de Riazan dans la nuit du 1er septembre.
Le 2 septembre, Napoléon contemple Moscou du haut de la montagne Poklonnaïa. Il demande que l’on fasse venir une délégation des représentants de Moscou. Mais personne ne vient, Moscou est vide.
À quatre heures de l’après-midi, les troupes de Murat entrent dans Moscou. Les soldats français s’installent dans les maisons laissées vides par les Russes. Ils se servent largement dans tout ce que les Russes ont laissé.
Les maisons de Moscou étant construite en bois et les soldats allumant des feux sans précautions, très vite de nombreux incendies brûlent dans Moscou sans que l’on sache si les Russes ou les Français les allument ou s’ils sont dus au manque de soins pris dans une ville vidée de ses habitants et occupés par une armée étrangère.
Pierre qui s’est rendu dans la maison de Joseph Alexéiévitch où il devait classer des livres maçonniques ne la quitte plus. Il s’est procuré un cafetan et un pistolet pour défendre Moscou. Ayant constaté qu’on ne défendrait pas Moscou, il décide qu’il doit sauver l’Europe en tuant Napoléon : « L’état physique de Pierre concordait avec son état mental. La nourriture grossière, inaccoutumée, l’eau-de-vie qu’il avait bue ces jours-ci, la privation de vin et de cigares, le linge sale non changé, deux nuits sans sommeil sur un divan trop court, tout cela soutenait Pierre dans un état d’excitation voisin de la folie. »
Le convoi des Rostov a peu avancé. Natacha a appris que le prince André fait partie des blessés qui les accompagnent. Elle décide qu’elle doit le voir, et la nuit, à l’étape, elle le rejoint là où il est couché. Le prince André lui tend la main et lui sourit. Natacha va le soigner tout au long du voyage.
Le 3 septembre, Pierre veut accomplir son projet de tuer Napoléon et se dirige vers la rue Arbate où devrait passer Napoléon. En chemin, il est arrêté par une femme qui lui demande d’aller sauver son enfant dans sa maison en feu. Pierre parvient à sauver l’enfant.
Ensuite, il voit dans la rue un soldat français voulant arracher le collier d’une belle Arménienne. Il voit rouge et se bat avec deux soldats français. Il est arrêté et mis en prison.
Douzième partie
À Pétersbourg, la vie de salon continue. Le 26 août, le jour même de la bataille de Borodino, Anna Pavlovna donne une soirée. Elle compte sur de bonnes nouvelles le lendemain, jour de l’anniversaire de l’empereur.
Le lendemain, les nouvelles arrivées à Pétersbourg font croire que l’armée russe a été victorieuse à Borodino puisqu’elle a arrêté les Français. Les choses changent quand on apprend que Moscou est livrée aux Français.
À cette même époque, Hélène Bezoukhov qui était malade, meurt d’avoir pris trop de médicaments.
Nicolas Rostov a été envoyé à Voronèje pour y acheter des chevaux. À Voronèje, la vie continue. Nicolas est reçu par le gouverneur et durant toute la soirée, faisant l’admiration de l’assemblée, il s’amuse beaucoup.
À la réception se trouve madame Malvintzeva, la tante de Marie Bolkonskï, chez qui Marie est réfugiée. Madame Malvintzeva invite Nicolas à lui rendre visite.
La femme du gouverneur qui est la tante de Nicolas lui propose de demander pour lui la princesse Marie en mariage. Nicolas se confie à elle. Il lui avoue qu’il aime Marie depuis qu’il l’a rencontrée, mais qu’il a promis le mariage à Sophie et qu’il veut s’y tenir.
Nicolas se retrouve avec la princesse Marie et c’est pour chacun le coup de foudre.
Nicolas est profondément épris de la princesse Marie, mais il veut respecter son engagement auprès de Sonia. Il reçoit une lettre de Sonia, lui disant qu’en raison des circonstances, elle le dégage de sa parole. Nicolas peut enfin envisager son mariage avec Marie.
Sonia a écrit à Nicolas à la demande de la comtesse Rostov bien qu’elle aime toujours profondément Nicolas et qu’elle veuille l’épouser. Elle espère très fort que Natacha épouse le prince André ce qui empêcherait que Nicolas épouse Marie.
Pierre depuis qu’il a été arrêté est maintenant en prison accusé d’être un incendiaire. Le 8 septembre, il est jugé par le général Davoust avec treize autres accusés. Il est emmené au poteau d’exécution et découvre alors qu’il ne fait pas partie des condamnés.
Pierre est gracié. Il est conduit dans un baraquement où se trouvent des soldats prisonniers. Il y reste quatre semaines. Il a pour voisin un paysan simple, Platon Karataïev qui le prend en amitié.
La princesse Marie décide de rejoindre son frère qui se trouve à Iaroslav. Le voyage dure deux semaines, car il faut contourner Moscou. Quand Marie arrive auprès d’André, il est à nouveau au plus bas. L’entrevue est très décevante pour Marie, le prince André semble être ailleurs et elle pense que c’est parce qu’il sent qu’il va mourir.
Natacha et Marie le veillent continuellement jusqu’à sa mort.
Treizième partie
La retraite de l’armée russe s’est faite en direction du sud. La raison n’est pas claire. Selon Tolstoï, c’est pour rejoindre les provisions qui étaient disposées près de Toula. Cette marche a été baptisée « marche de flanc » et est considérée comme la cause du succès de l’armée russe. « La célèbre marche de flanc consistait uniquement en ce que l’armée russe, reculant toujours en sens contraire de l’invasion, après que celle-ci eut cessé, s’écartait de la ligne droite suivie au commencement, et, ne se voyant pas poursuivie, allait naturellement du côté où abondaient les provisions. Que l’on ne se représente pas d’hommes de génie en tête de l’armée russe, qu’on s’imagine l’armée seule, sans chefs, cette armée, n’aurait pu faire autre chose que le mouvement de recul vers Moscou, en décrivant un arc du côté où étaient les provisions et le pays abondamment pourvu. »
Pendant le mois qui suit l’entrée de Napoléon à Moscou, l’armée russe se renforce alors que l’armée française se désorganise en pillant Moscou.
Koutouzov souhaite retarder tout combat. Mais l’armée russe veut se battre et Koutouzov se laisse convaincre d’attaquer. L’attaque est fixée au 5 octobre. C’est la bataille de Taroutino où les Russes mettent les Français dirigés par Murat en fuite. « Il est difficile et impossible d’imaginer une autre issue plus utile que celle de cette bataille : avec des dépenses minimes, avec la plus grande confusion, avec des pertes infimes, nous obtenions les plus grands résultats de toute la campagne. Du recul, nous passions à l’attaque, nous montrions la faiblesse des Français, nous donnions ce choc qu’attendait l’armée de Napoléon pour commencer à fuir. »
L’armée française est découragée et veut quitter la Russie. Napoléon en donne l’ordre alors que l’hiver va rendre les routes difficiles.
Le 6 octobre, Pierre est toujours dans sa baraque et s’y trouve bien malgré les privations. Il est aimé et respecté par tous : « Dans le cours de sa vie, il avait cherché de tous côtés ce calme, cet accord avec soi-même qui le frappaient tant pendant la bataille de Borodino. Il les avait cherchés dans la philanthropie, dans la franc-maçonnerie, dans les distractions de la vie mondaine, dans le vin, dans l’exploit héroïque du sacrifice de soi-même, dans l’amour romanesque pour Natacha. Il les avait cherchés dans la pensée, et toutes ses recherches avaient été déçues. Et spontanément, il avait trouvé ce calme et cet accord par la seule horreur de la mort, par les privations. »
Dans la nuit du 6 au 7 octobre, les Français commencent à quitter Moscou. Les prisonniers sont emmenés et découvrent Moscou en cendres.
L’armée française part d’abord vers le Sud, mais se heurtant à l’armée russe, elle reprend la route de Smolensk par où elle est venue à Moscou. Beaucoup de généraux russes voudraient profiter de la déroute des Français pour les attaquer, mais Koutouzov les retient tant qu’il peut pour éviter de perdre trop d’hommes.
Quatorzième partie
L’armée napoléonienne repart, vaincue sans avoir perdu aucune bataille. Les troupes russes ont toujours fui devant les Français. C’est le peuple russe qui en mettant partout le feu a privé les Français des moyens de rester en Russie.
Fin octobre, les Russes n’attaquent pas en masse, mais des petits détachements de cosaques et également des paysans attaquent les groupes de Français isolés.
Pétia Rostov est maintenant dans l’armée russe. Il se retrouve par hasard auprès de Denissov qui s’apprête à attaquer un régiment français avec son petit groupe.
Dolokhov emmène Pétia en éclaireur, contre l’avis de Denissov, pour espionner le régiment français.
Le lendemain matin, Denissov part attaquer les Français, accompagné de Pétia. Pétia se jette au milieu des tirs et est tué net d’une balle dans la tête.
Les Français sont tués et parmi les prisonniers russes qu’ils accompagnaient se trouve Pierre Bezoukhov.
Les gelées commencèrent le 28 octobre tuant encore plus de soldats français. Arrivés à Smolensk à mi-novembre, les soldats pillent les magasins et se battent entre eux pour les vivres.
L’armée russe continue de poursuivre l’armée française qui ne fait que fuir en courant. Une rencontre a lieu sur la Bérésina. L’armée française est bloquée, les ponts étant tenus par l’armée russe. Napoléon évite que l’armée soit entièrement détruite en parvenant à construire deux ponts pour passer la rivière. Napoléon laisse alors l’armée pour rentrer à Paris.
Malgré l’absence de combat, l’armée russe perd la moitié de ses hommes à cause du froid et de la faim. Du côté des Français, seulement un centième des hommes purent repasser la frontière.
Certains disent que l’armée russe aurait pu capturer toute l’armée française, y compris Napoléon, et a échoué en cela. Mais : « Le but de couper la route à Napoléon et à son armée n’exista jamais que dans l’imagination d’une dizaine d’hommes. Il ne pouvait exister parce qu’il était insensé et inaccessible. Le but du peuple était de délivrer sa terre de l’invasion. Ce but a été atteint, premièrement de soi-même : puisque les Français s’enfuyaient, il n’y avait qu’à ne pas arrêter leur mouvement ; deuxièmement, par les actions de la guerre nationale qui décimait les Français, et, troisièmement, parce qu’une forte armée russe suivait pas à pas les Français, prête à employer la force en cas d’arrêt de leurs troupes. »
Quinzième partie
Après la mort d’André, Marie et Natacha sont tristes. La princesse Marie s’apprête à rentrer à Moscou et Natacha reste seule avec sa tristesse.
On apprend alors la mort de Pétia et Natacha doit alors s’occuper de réconforter sa mère qu’elle ne quitte plus.
Les soins donnés à sa mère redonnent de la vigueur à Natacha. Fin janvier 1813, elle part à Moscou avec Marie qu’elle ne quitte plus.
L’armée russe poursuit toujours les Français perdant des hommes sans combats. Les généraux russes voudraient toujours attaquer, mais Koutouzov retient l’armée qui n’est plus en état de combattre.
Les contemporains reprocheront à Koutouzov de ne pas avoir capturé tous les Français : « Pour les historiens russes – c’est étrange et triste à dire – Napoléon, cet instrument minime de l’histoire qui, jamais et nulle part, même en exil, ne montra de dignité, Napoléon est un objet d’enthousiasme et d’admiration. Lui est grand, et Koutouzov, cet homme qui, du commencement à la fin de son activité en 1812, de Borodino à Vilna, ne se trahit pas une seule fois, par aucun acte, qui est dans l’histoire un exemple extraordinaire du sacrifice, de la conscience opportune, de la prescience de l’importance des événements futurs, ce Koutouzov est représenté par les historiens comme un être nul et misérable et, en parlant de Koutouzov et de 1812 ils paraissent toujours avoir quelque honte. »
Le 29 novembre, après la bataille de la Bérézina, Koutouzov arrive à Vilna où il peut enfin trouver un peu de confort et où il se repose laissant faire ses généraux.
Le 7 décembre, l’empereur arrive à Vilna et expose à Koutouzov ses vues sur la future campagne à l’étranger. Koutouzov s’oppose à la poursuite de la guerre en Europe. L’empereur retire, tout en l’honorant son commandement à Koutouzov. Koutouzov meurt en avril 1813.
Pierre lors de sa libération a appris la mort d’André et celle d’Hélène, sa femme. Il se rendit à Orel où il tomba malade et ne guérit qu’après trois mois. Pierre quand il reprend la vie en société est beaucoup plus attentif aux autres et acquiert la sympathie de tous.
À Moscou, Pierre rend visite à la princesse Marie. Il y trouve Natacha qu’il avait un peu oubliée. Il est à nouveau ému et troublé dès qu’il la voit. Il reste toute la soirée avec Marie et Natacha en racontant tout ce qui lui est arrivé et la sensation qu’il en garde : « On dit : les malheurs de la souffrance, commença Pierre. Oui, si l’on me disait : Veux-tu rester ce que tu étais avant la captivité ou revivre tout ce que tu as vécu ? Au nom de Dieu, encore une fois la captivité et la viande de cheval ! Quand on nous chasse du sentier habituel nous pensons que tout est perdu, tandis que c’est alors seulement que commence la vie, nouvelle, bonne. Tant qu’il y a la vie c’est le bonheur, chacun en a beaucoup, beaucoup, devant soi, c’est moi qui vous le dis. »
Pierre veut épouser Natacha. Il retarde son départ pour Pétersbourg. Il retourne chaque jour chez la princesse Marie pour rencontrer Natacha. Pierre avoue son amour pour Natacha à la princesse Marie qui lui affirme que Natacha l’aime et promet de tout faire pour les réunir. Elle lui conseille d’effectuer son voyage à Pétersbourg en attendant.
Épilogue - Première partie
Natacha épousa Pierre Bezoukhov en 1813. Le vieux comte Rostov mourut peu de temps après.
Nicolas qui était à Paris avec les troupes russes donna sa démission. Il constate l’énormité des dettes de la famille et décide qu’il se doit de les assumer en acceptant l’héritage. Il reprend du service civil, mais les appointements suffisent juste à payer le train de vie dont la comtesse, sa mère, a l’habitude.
La princesse Marie vient rendre visite aux Rostov et Nicolas la reçoit très froidement. Il a honte de sa situation actuelle. Sa mère le pousse à rendre visite à la princesse, ce qu’il finit par faire.
La rencontre commence froidement. Marie lui reproche de le priver de son ancienne amitié et se met à pleurer. Nicolas se laisse alors aller à son ancienne émotion.
Nicolas épousa Marie à l’automne 1813. Il s’installe à Lissia-Gorï, dans la propriété des Bolkonskï où il amène sa mère et Sonia.
Il peut alors payer ses dettes et pense à racheter le domaine d’Otradnoié
Nicolas s’occupe de l’exploitation du domaine et y parvient très bien, le faisant fructifier et étant apprécié de ses paysans.
Pierre et Natacha vivent en pleine harmonie : « Après sept années de mariage, Pierre se sentait la conscience joyeuse et ferme de n’être pas un mauvais homme, et il sentait cela parce qu’il se voyait reflété en sa femme. En lui, il sentait le bon et le mauvais, mélangés, atténués l’un par l’autre, mais en sa femme se reflétait seulement ce qui était vraiment bon : tout ce qui n’était pas absolument bien était rejeté, et son reflet se produisait non par la voie de la pensée logique, mais d’une façon autre, mystérieuse, immédiate. »
En 1820, l’empereur s’adonne au mysticisme et ne s’occupe plus des affaires de la Russie : « Voici quelle est la situation à Pétersbourg, l’empereur ne s’intéresse à rien. Il est tout au mysticisme (maintenant Pierre ne pardonnait à personne le mysticisme) et ne cherche que le calme, et seul ces hommes sans foi ni loi Magnitzkï, Araktchéiev et tutti quanti qui sabrent et étranglent tout ce qu’il y a de bon… »
Pierre veut constituer une société secrète pour lutter contre les agissements des mauvais conseillers de l’empereur. Nicolas, au contraire, considère que son devoir est d’obéir au gouvernement, quel qu’il soit.
Épilogue - Deuxième partie
Tolstoï s’intéresse à la façon dont on raconte l’Histoire moderne. La « nouvelle histoire » expliquerait de cette façon les événements de la fin du XVIIIe siècle et du début du XIXe : « Louis XIV était un homme très fier et très orgueilleux. Il eut telles et telles maîtresses, tels et tels ministres ; il gouverna mal la France. Ses héritiers étaient aussi des hommes très faibles qui aussi gouvernèrent très mal et eurent tels et tels favoris, telles et telles maîtresses. En outre, quelques personnes, en ce temps, écrivirent des livres. À la fin du dix-huitième siècle se réunirent à Paris deux dizaines de personnes qui se mirent à proclamer que tous les hommes sont égaux et libres. À cause de cela, dans toute la France, les hommes commencèrent à s’entre-tuer, à s’égorger : on tua le roi et plusieurs autres personnages. Dans ce temps, en France se trouvait un homme de génie, Napoléon. Il vainquit tout le monde, c’est-à-dire prit, tua beaucoup de gens parce que c’était un grand génie ; et il s’en alla tuer, on ne sait pourquoi, des Africains, et il les tua si bien, il était si rusé et si intelligent, qu’en revenant en France, il ordonna à tout le monde de lui obéir et tous lui obéirent. Une fois devenu empereur, il alla de nouveau tuer des gens, en Italie, en Autriche, en Prusse, et là-bas aussi, il en tua beaucoup. En ce temps, régnait en Russie l’empereur Alexandre qui avait résolu de rétablir l’ordre en Europe ; c’est pourquoi il fit la guerre à Napoléon. Mais en 1807, tout d’un coup, il se lia d’amitié avec lui ; en 1811 ils se brouillèrent et, de nouveau, commencèrent à tuer beaucoup de gens, Napoléon amena en Russie six cent mille hommes et s’empara de Moscou. Ensuite, tout d’un coup, il s’enfuit de Moscou et alors, l’empereur Alexandre, avec l’aide et les conseils de Stein et des autres, coalisa l’Europe pour marcher contre le destructeur de sa tranquillité. Tous les alliés de Napoléon devinrent soudain ses ennemis, et leur armée marcha contre Napoléon qui avait réuni de nouvelles forces. Les alliés vainquirent Napoléon, entrèrent à Paris, forcèrent Napoléon à renoncer au trône et l’envoyèrent à l’île d’Elbe, sans le priver du titre d’empereur et en lui témoignant leur respect, bien que, cinq années auparavant et une année après, tous le considérassent comme un bandit hors la loi. Et Louis XVIII commença à régner, Louis XVIII dont jusqu’alors les Français et les alliés ne faisaient que se moquer. Et Napoléon, en versant des larmes devant sa vieille garde, renonça au trône et partit en exil. Ensuite les hommes d’État et les diplomates (surtout Talleyrand qui avait réussi à s’asseoir sur un fauteuil avant un autre, ce qui élargit les frontières de la France) eurent des entretiens à Vienne et, par leurs conversations, firent les peuples heureux ou malheureux. Tout à coup, diplomates et monarques faillirent se quereller. Ils étaient déjà près d’ordonner de nouveau à leurs troupes de s’entre-tuer lorsque Napoléon, avec un bataillon, arriva en France, et les Français qui le haïssaient, tous, aussitôt, se soumirent à lui. Mais les monarques alliés mécontents de cela recommencèrent à faire la guerre aux Français. Et on vainquit le génial Napoléon, on l’envoya à l’île Sainte-Hélène, le considérant tout à coup comme un brigand. Là-bas, sur un rocher, l’exilé séparé des êtres chers à son cœur, de sa France bien-aimée, mourut d’une mort lente, en transmettant ses grandes œuvres à la postérité. Et en Europe se produisit une réaction, et tous les empereurs, de nouveau, opprimèrent leurs peuples. »